(version / 2013)
THEATRE LE PUBLIC
09/05/13. Première représentation au Public de ce chef d’œuvre de Jean-Baptiste Poquelin, appelé plus simplement MOLIERE (né le 15/01/1622)
Serge Demoulin a mis en scène la comédie (coup de) ballet de Molière avec, dans le rôle de Monsieur Jourdain : Michel Kacenelenbogen (co – directeur du Théâtre Le Public avec Patricia Ide) entouré par douze jeunes acteurs , faisant partie de « La Troupe du Public ».

FLASH
Pour la petite histoire, Molière jouait le rôle de Monsieur Jourdain.
La pièce a obtenu un énorme succès dès sa création tant à la ville qu’à la cour.
La pièce a été jouée à la Comédie Française 443 fois, de 1680 à 1932.
Quel est l’auteur qui peut s’honorer d’avoir été joué autant de fois ! Et ce succès se maintient encore de nos jours. La preuve aujourd’hui même, ce 09/05/2013 !
LE BOURGEOIS GENTILHOMME
Le Public : Pour Vous, « Le Bourgeois » est une pièce contemporaine ?
Michel Kacenelenbogen : Oui bien sûr, elle est et restera une pièce contemporaine parce que c’est l’histoire d’un homme qui paye tout le monde autour de lui pour entendre que ce qu’il veut entendre.
Prenons certaines personnalités politiques ou des affaires qui s’arrangent pour n’avoir autour d’eux que des gens qui les flattent, ils payent pour entendre ce qu’ils veulent, ils achètent même les médias, pour n’avoir de reflet d’eux-mêmes qu’une image d’homme viril, drôle, brillant, charismatique.
« Le Bourgeois gentilhomme » est carrément une peinture sociale contemporaine : les conséquences du comportement du Bourgeois, quand il l’impose à tout son entourage sont terribles.
Il dilapide sa fortune, il met en danger son couple, il travaille au malheur de sa fille (chez Molière ça arrive souvent çà).
Mais de mon point de vue , le Bourgeois… , c’est aussi un homme qui aspire à des valeurs qui ne sont pas nulles , tout le rapport à la culture , ce qu’elle apporte , ce qu’elle permet d’épanouissement et de compréhension du monde qui nous entoure.
Monsieur Jourdain veut avoir accès à cela, alors il s’entoure de gens cultivés qui vont le plumer !
Donc, vous voyez, cette pièce est contemporaine !
RETOUR DANS LE PASSE.
La première représentation du « Bourgeois gentilhomme » a eu lieu le 14 octobre 1670 à Chambord devant la cour… Lulli fut chargé de la partie musicale. Molière, qui savait chanter et danser avec agrément, et auquel le sujet de la pièce : « une cérémonie turque burlesque » avait été imposé, s’avisa «de coudre les intermèdes au sujet de la pièce et de ne faire qu’une seule chose du ballet et de la comédie ». Cette pièce obtint dès la première le plus franc succès à la cour et à la ville…
Commentaires de l’époque :
Voltaire (XVIIIème) : Cette pièce de Molière est un des plus heureux sujets de comédie que le ridicule des hommes ait pu fournir. La folie du bourgeois est la seule qui soit comique et qui puisse faire rire au théâtre.
J.J.Rousseau (XVIIIème) : Quel est le plus blâmable, d’un bourgeois sans esprit et vain qui fait sottement le gentilhomme ou du gentilhomme fripon qui le dupe ? Dans cette pièce, ce dernier n’est-il pas l’honnête homme ?
Vauvenargues (XVIIIème) : On peut mettre en parallèle Molière avec Racine. L’un et l’autre ont parfaitement connu le cœur de l’homme ; l’un et l’autre se sont attachés à peindre la nature. Racine la saisit dans les passions des grandes âmes, Molière dans l’humeur et les bizarreries des gens du commun.
Sainte-Beuve (XIXème) : Il faut admirer chez Molière ce surcroît toujours montant et bouillonnant de verve comique , très folle , très riche, inépuisable de la farce bouffonne .
Faguet (XVIIème): Molière est un des plus grands peintres de l’humanité que l’humanité ait produits.
Lanson (XIXème) : La comédie de Molière nous offre un vaste tableau de la France du XVII e siècl étonnant de couleur et de vie.
(Propos publiés dans la collection « Petits Classiques Larousse »)
THEATRE LE PUBLIC/LE BOURGEOIS GENTILHOMME
Un spectacle qui déborde de joie, de rire, de rythme sans une seule seconde de relâchement.

20h30. Le rideau s’ouvre et l’on aperçoit sur le côté jardin de la scène un ordinateur – nous sommes bien au 21ème siècle – qui envoie les premières mesures mi classique / mi rock, ça sonne bien Lully revu par Daphné D’Heur (adaptatrice musicale et coaching vocal).
Daphné D’Heur : « Le Bourgeois… » dans la mise en scène de Serge Demoulin, devient une œuvre terriblement exigeante pour les acteurs.
Plus de corps de ballet, plus de musiciens/chanteurs.
Aux acteurs de danser, de chanter et bien entendu de jouer la comédie. Dois-je vous le dire, cela représente un travail colossal qui ne se fait pas en quelques semaines. Nous y avons tous travaillé depuis le début de la saison, en septembre dernier.
Avec Stéphanie Lowette, la chorégraphe, nous avons coaché les comédiens pour qu’ils relèvent ce défi !
Et ils l’ont fichtrement relevés ce déf!
RENCONTRE AU SOMMET MUSICAL
Daphné D’Heur : Une rencontre qui remonte à l’été 2012 presque un an avant le départ du spectacle.
Nous avons fait des recherches et nous avons constaté qu’au niveau de la musique, il n’y a que de rares versions dans lesquelles la partition de Lully est adaptée.
Nous avons travaillé sur une musique très connue que l’on a pu écouter il y a quelques années dans le film d’Alain Corneau « Tous les matins du monde » : Lully et Marin Marais.
Le désir de Serge était de pouvoir distordre cette musique et de l’emmener dans une sphère musicale tantôt pop, tantôt rock.
Ainsi, un peu à la manière d’un DJ, j’ai remixé Lully , aussi bien avec des compositions personnelles que des standards de la musique pop et du rock comme Madonna ou Gossip pour ne citer qu’eux.
Beau travail ! Entraînante cette musique et pas dérangeante du tout. Lully reste présent, les sonorités baroques se font entendre tout comme les lignes mélodiques quand il s’agit des chants. Sans oublier la musique polyphonique pour la « Cérémonie du mariage » (la Turquerie) qui se situe presqu’à la fin de la pièce, et le caractère lyrique pour le chœur, toujours chanté par « la Troupe » !
LE BOURGEOIS … UN SPECTACLE BURLESQUE…UNE FARCE PETILLANTE ET INTELLIGENTE.

Michel Kacenelenbogen : Ce « Bourgeois » est non seulement contemporain mais également universel dans son caractère : naïf , vaniteux , égoïste, autoritaire, il est un portrait type.
Il est carrément une peinture sociale contemporaine.
La mise en scène et en action de Serge Demoulin est superbe, d’une vitalité débordante, d’un humour décapant, d’une précision tout à fait remarquable.
Il a dirigé les jeunes acteurs de la «Troupe » avec énergie et alacrité.
Les mouvements et les gestuelles sont surprenants !
C’est mené tambour battant !
Un tourbillon presque permanente en scène durant près de trois heures (Que l’on se rassure, il y un entracte de 20 minutes)…c’est formidable !
Serge Demoulin n’a pas « touché » au texte de Molière, à part quelques répliques du tout début de la pièce.
On s’en rend compte en l’écoutant, c’est vraiment du Molière !
ET JOUENT BRILLAMMENT LES COMEDIENS…

Tous les personnages sont magnifiquement croqués : Madame Jourdain, (l’épouse du sacré bourgeois) Lucile (la fille de M.Jourdain), Nicole(la servante) , Cléonte (l’amoureux de Lucile), Covielle ( le valet de Cléonte), Dorante ( l’amant de Dorimène) , Dorimène ( la marquise)…
Et que dire des scènes complètement folles avec ces « maître à danser », « maître de musique », « maître d’armes », « maître tailleur », « maître de philosophie ».
Fabuleux ! Inénarrable !
M.Jourdain : Par ma foi, il y a plus de quarante ans que je dis de la prose sans que j’en susse rien !
Et que dire alors du comédien qui tient le rôle principal de la pièce, ce Bourgeois aux rêves de grandeur :
Michel Kacenelenbogen !
Un grand talent, que nous lui connaissions déjà depuis quelques années. Il est superbe.
Il joue à merveille son personnage, unique dans l’œuvre de Molière. Il est à la fois naïf, drôle, arrogant, présomptueux, émouvant ! Il joue à la fois classique et moderne.
Il représente remarquablement ce bon bourgeois qui aurait tant voulu avoir l’air mais qui n’a pas l’air du tout.
Il traduit très bien cet « être » agaçant, touchant, pétri d’enfance, de colère et de vanité. Mais aussi un homme émerveillé et amoureux…
LE BOURGEOIS : UN MIROIR D’HUMANITE
Le bourgeois Jourdain, avec ses rêves de grandeurs , offre bien du spectacle aux personnages qui l’entourent ! Il convoque maîtres d’armes, de danse, de musique et de philosophie pour faire siennes les belles manières des gentilshommes et…tenter de plaire à Madame la Marquise.
Mais ce brave homme danse comme une baleine, rime comme un butor … « de pied plat ridicule aurait dit Cyrano » courtise comme un nigaud et fait de la prose sans le savoir.
Alors tout ce monde qui l’entoure, à l’exception de sa femme, se joue du ridicule de Jourdain !
LE BOURGEOIS GENTILHOMME AU PUBLIC…

Le spectacle-vedette de la saison 2012-2013 !
Mise en scène intelligente, recherchée, originale et de haute qualité de Serge Demoulin.
Assistanat à la mise en scène : Kim Leleux
Scénographie (percutante) : Dimitri Shumelinsky
C’est lui Dimitri qui a un joli mot pour dire l’esthétique du spectacle : « Le Glam’barock »
Costumes (colorés avec des touches d’époques différentes) : Françoise Van Thienen
Lumière : Laurent Kaye
Chorégraphie (exaltante) : Stéphanie Lowette
Adaptation musicale et coaching vocal : Daphné D’Heur
Avec Anne Sylvain dans le rôle de Madame Jourdain
Et
Babetida Sadjo, Maroine Amimi, Claire Beugnies, Cédric Cerbara, Grigory Collomb, Vincent Doms, Alexis Julémont, Agnieszka Ladomirska , Marvin Mariano , Quentin Minon et Real Siellez
Et
Michel Kacenelenbogen : Le Bourgeois Gentilhomme
« Dire » du Molière, ce n’est pas de tout repos ?
Michel Kacenelenbogen : La dernière fois que j’ai dit du Molière c’était au Conservatoire ! Je ne sais ce que ça fait, mais je suis très content.
Dire Molière : « Holà Messieurs, qu’est-ce ? Me ferez-vous voir votre petite drôlerie ? » C’est la première réplique.
Vous la dites, il n’y a rien d’autre à faire, Molière fait le reste !
Et Jean Baptiste Poquelin d’éclater de rire !

LE BOURGEOIS GENTILHOMME
AU
THEATRE LE PUBLIC
Rue Braemt 64/70 1210 Bruxelles
Jusqu’au 29/06/2013
Du mardi au samedi à 20h30
Infos Réservations : 0800 / 944 44
Une truculente clôture de saison au Public avec ces trois spectacles :
(Grande Salle) : Un certain Monsieur Jourdain dit Le Bourgeois !
(Salle des Voûtes) : Les 39 marches » (reprise) d’après Hitchcock !
(Petite Salle) : Illusions avec Jack Cooper, le magicien !
Photos : Bruno Mullenaerts
Roger Simons